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La Quête de Joie
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Fêter La Quête de Joie (1933-2023)
Ouverture de la soirée poétique du 5 décembre 2023
par Isabelle Renaud-Chamska
Nous sommes réunis ce soir pour entendre La Quête de Joie de Patrice de La Tour du Pin, sous la haute autorité spirituelle et littéraire du Cardinal de Bérulle dont la silhouette se déploie au fond de la salle où nous sommes, et dont Patrice était un lointain neveu.

Il aurait été magnifique de faire une lecture intégrale du recueil, qui seule permet une intelligence globale (Patrice aimait ce mot), chaque poème entrant en résonnance ou en opposition avec tous les autres, dans une symphonie d’une rare profondeur.

Nous en avons retenu 25 sur 53, soit la moitié. Chacun des lecteurs a choisi les poèmes qu’il avait envie de partager avec vous. Vous entendrez les textes dans l’ordre du recueil. Car, par un heureux hasard, le respect des goûts de chacun épouse le déroulé de La Quête de Joie. Mais il vous en restera encore beaucoup à lire ou à relire lorsque vous rentrerez chez vous !

La Quête de Joie trace le parcours initiatique d’un tout jeune homme (Patrice n’a pas 20 ans lorsqu’il se lance dans cette aventure d’écriture) à la découverte de lui-même. La Quête de Joie est une quête de soi. Chaque poème est le lieu d’une rencontre avec une facette de sa personnalité, une sorte de cristallisation. Les diverses figures qui jalonnent le recueil sont autant de tentations et d’attirances, des désirs multiples et contradictoires, souvent complexes, qui prennent des formes hybrides :
la sauvagine, femme-oiseau migrateur, une enfant souvent, en route vers le Nord, proie convoitée du chasseur dans la fièvre des marais, avec ses frères, et ses « cousins »,
les Anges sauvages, créatures à la fois spirituelles et physiques, qui vont et viennent dans le ciel, à toutes les altitudes, gibier à chasser pour l’amour et le secret de la vie dont ils sont porteurs et dont les quêteurs cherchent à s’emparer ;
Ullin, personnage énigmatique, incarne la tentation du froid, la lucidité critique, le mépris de l’autre, l’orgueil aristocratique. Il est doté des lumières de l’intelligence et de la raison, et prône la mise à distance et même la mort du poème, à l’opposé de Lorenquin, le maître exigeant mais chaleureux, qui a lancé les quêteurs de Joie sur les chemins du combat spirituel par le moyen de la création poétique ;
Laurence représente la tentation de l’éros, de la beauté sensuelle, de « l’orgie dionysiaque de la chair », liée à la luxuriance des plantes et à la richesse du monde animal. Nous rencontrerons deux autres figures féminines : Gemma et Île.
Le Christ, incarnation de l’amour suprême, est le but et le lieu de la Joie, mais il est défiguré sur la croix où on l’a cloué par lâcheté et où il continue pourtant de sourire.

Ces poèmes, souvent tragiques, créent une dramaturgie dans laquelle la mort et la vie s’engendrent l’une l’autre sur la route de la Joie au long des étapes de la Quête.
Ils enchantent par leur musique, les personnages et les paysages qu’ils font naître. Mais conjointement ils inquiètent, car ils ouvrent des abîmes de questions qu’ils laissent sans réponses, créant parfois une forme de désenchantement. L’acte poétique se remet lui-même en cause, s’accusant d’être trompeur, simple moyen de consolation éphémère comme les paradis artificiels. Il déçoit et ne répond pas aux attentes supérieures de la Quête. C’est pourtant dans et par le poème que le poète et ses lecteurs peuvent trouver la Joie. Il n’y a pas d’autre route à emprunter. Il faut donc, comme les quêteurs que nous allons suivre, et que nous sommes, tout abandonner, pour nous enfoncer dans la brume du poème, seulement guidés par les cris des enfants sauvages et le chant des paradisiers.

Nous serons entraînés dans cette aventure par Robin, Remi, Victor et François-Xavier qui inscrivent depuis de nombreuses années leur travail de récitation poétique sous le patronage et dans la mémoire du Collège de Tess, cette clôture de chanteurs créée par le Poète dans sa Somme de poésie, pour Une vie recluse en poésie, avec Patrick aussi, membre du Comité directeur de notre Société des Amis de Patrice de la Tour du Pin. Nous allons écouter ces 25 poèmes accompagnés et « commentés » par les improvisations conjointes d’Emmanuel et de Robin à la guitare.

Nous ne ferons pas d’interruption. Parfois vous serez un peu perdus, vous aurez le souffle court. N’ayez pas peur si vous êtes quelque temps en apnée : il suffit de s’abandonner aux rythmes et à la musicalité des poèmes pour trouver un nouveau souffle.

Je vous remercie de votre présence et je remercie le P. Lacroix et les Prêtres de Saint-Sulpice de leur accueil chaleureux. J’aimerais dédier cette soirée à notre ami Pierre de Bernis, neveu et filleul de Patrice de La Tour du Pin qui nous a quittés à la fin de l’été. Avec son épouse Nathalie, il était un soutien fidèle de notre association dont il suivait attentivement tous les travaux.

Il est l’heure maintenant d’ouvrir La Quête de Joie en commençant par le commencement…

La Quête de Joie
Programme des textes donnés le 5 décembre 2023
chez les Sulpiciens, 6 rue du Regard, 75006
Récitants et lecteurs : Robin Devaux, François-Xavier Durye, Victor Lobmeyr, Remi Picard, Patrick Piguet, Isabelle Renaud-Chamska
Guitaristes : Emmanuel Desvaux, Robin Devaux
1- Prélude
2- Enfants de Septembre
3- Apparition d’Ullin
4- La quête de joie
5- Légende
6- Le Christ aux phares
7- La traque
8- Le tombeau d’Ullin
9- Tentation
10- Première épître d’un quêteur de joie à Lorenquin
11- Laurence printanière
12- Ullin-Roi
13- Le Christ voilé I
14- Le Christ voilé II
15- Le Christ voilé III
16- Interlude
17- Les laveuses
18- Laurence endormie
19- Deuxième épître d’un quêteur de joie à Lorenquin
20- Rythme
21- Hameaux
22- Épiphanie
23- Fête de nuit
24- Le désir naît…
25- Épilogue
Pour lire La Quête de Joie : bibliographie
Une Somme de poésie I Le jeu de l’homme en lui-même, Gallimard, 1981 (« Cinquième livre » p. 263-327).
La Quête de Joie suivie de Petite somme de poésie, NRF Coll. Poésie / Gallimard, 1967.
La Quête de Joie, Gallimard, édition 1939, renouvelée en 1966.
Une Somme de poésie, Gallimard, 1946 (« Cinquième livre » p. 287-337).
La Quête de Joie, Gallimard, édition 1939.
La Quête de Joie Paris La Tortue, 60 & 62 rue François 1er, 1933.

Quelques études pour approfondir la lecture de La Quête de Joie :
Henriette Levillain : « Enfants de Septembre » in Patrice de la Tour du Pin, un poète de notre temps, I.R-C dir., Lethielleux-Les Bernardins, 2011, p. 109-121.
Patrice de La Tour du Pin : La Quête de Joie au cœur d’Une Somme de poésie, colloque tenu au Collège de France les 25 et 26 septembre 2003, textes réunis par I. Renaud-Chamska, Droz, 2005.
Luca Pietromarchi, Les Anges sauvages, la Quête de Joie de Patrice de La Tour du Pin, Paris, Honoré Champion éd. 2001.
Isabelle Chamska, Patrice de La Tour du Pin, biographie spirituelle, Desclée, 1992, p. 33-80.
Colloque Patrice de La Tour du Pin tenu à la Sorbonne les 21 et 22 novembre 1981, Y-A. Favre dir. Librairie Nizet. éd. p. 49-86.

Pour écouter un choix de poèmes de La Quête de Joie :
« Promenades et flâneries au domaine de poésie », émissions animées par Pascal Payen-Appenzeller
 
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